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27/02/2009

Clandestin

Parfois la vie nous emmène là où nous ne pensions pas aller. Notre route croise celle d'un inconnu qui au fil des jours devient quelqu'un. Quand l'inconnu en question est africain, immense, noir-noir comme disait Murielle Robin, et qu'il est clandestin depuis six ans, cela nous remue profondément le cœur. Clandestin, exploité depuis six ans par ses propres compatriotes. Pas de congés depuis six ans. Pas de rencontre avec sa famille depuis six ans. Une vie à la portion congrue pour envoyer de l'argent au pays. Clandestin, pauvre parmi les pauvres, il est  considéré comme un nabab par ceux qui sont restés là-bas. Il est le riche qui vit en Eldorado et  dont les autres attendent la lune. Il ne parle pas français. Sa langue pour communiquer est l'anglais, mais un anglais pas toujours facile à comprendre, même par des anglophones. La barrière linguistique augmente sa solitude car ceux qui ne parlent pas l'anglais n'osent pas l'inviter. Pourtant, il a toujours le sourire. Il accueille avec joie la moindre manifestation d'amitié. Il pense rester encore quelques années le temps de finir de payer la maison qu'il fait construire au  pays.

Jusqu'au jour où son corps n'en peut plus de ces semaines exténuantes, de ces années sans congés, du mal du pays. Son corps en a plein le dos, et le dos ne répond plus présent. Tout s'effondre. Clandestin, il ne peut plus travailler et donc ne touche plus rien. Et là, nous nous retrouvons totalement impuissants. Une solidarité s'organise autour de lui. Cependant, si nous pouvons l'aider à payer le kiné, nous ne pouvons réparer son dos. Si nous pouvons lui donner un peu d'argent, nous ne pouvons lui fournir du travail. Et bien sûr, nous ne pouvons lui apprendre le français en quelques jours. Nous ne pouvons pas grand chose sinon l'emmener dans des associations diverses pour l'aider à trouver une solution. Et il n'y a pas d'autre solution que le retour au pays où 80% de la population n'a pas de véritable emploi. Malgré tout ce que nous avons tenté, nous avons le sentiment douloureux de le renvoyer à sa misère. Et les questions affluent : comment rester en contact ? Comment être sûr qu'il ne meurt pas de faim ? Comment l'aider, de façon pratique à  créer quelque chose chez lui ? Et nos bonnes intentions se heurtent à notre impuissance. Nous avons mauvaise conscience et nous ne pouvons que pleurer.

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